vendredi 29 janvier 2016

La manie du remaniement



On assiste souvent dans les officines gouvernementales au processus pudiquement appelé «remaniement ministériel». L'exercice consiste à changer les portefeuilles de certains ministres, d'en rétrograder quelques-uns et de promouvoir des députés d'arrière-ban.

Le jeu de chaises musicales intéresse au plus haut point les journalistes qui, en temps normal, n'ont que des platitudes à nous mettre sous la dent. Effectivement, le procédé donne lieu à quantité de commentaires et d'analyses toutes plus empreintes de virtualités les unes que les autres.

Cependant, on oublie trop facilement qu'un remaniement ministériel est d'abord et avant tout un constat d'échec à demi-mot. Sans l'admettre, on signifie que l'équipe telle que constituée n'arrive pas à faire le travail qu'on attend d'elle. Il importe alors, afin de chercher à rebâtir la crédibilité d'un gouvernement en mal d'orientation, de la réorganiser afin de se donner une chance de succès accrue relativement aux dossiers à traiter. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer.

Il est d'ailleurs assez facile d'estimer dans quelle mesure un gouvernement prend conscience de sa propre incapacité lorsqu'on établit un pourcentage du nombre de ministres qui sont remplacés ou tout simplement déplacés. A contrario, ce pourcentage donne la note que s'attribue le pouvoir en place. Par exemple, si le remaniement touche 40% des ministres, cela signifie que le gouvernement mérite une note de 60%. Bah! c'est quand même la note de passage! Quantité de cancres en seraient très heureux*.

Ce qu'on oublie surtout de souligner, c'est que l'équipe d'origine, celle qui disparaît dans la tourmente, a bel et bien été choisie par le chef, lequel aurait dû être suffisamment compétent pour mettre en place les personnes les plus capables du premier coup. Je sais bien que les contraintes des tractations de coulisse et les choix discutables de l'électorat ne garantissent pas toujours que les meilleurs cerveaux sont mis à contribution. Cependant, qui dit remaniement dit également que ce sont grosso modo les mêmes qui continuent à servir, quoique à des postes différents. Si l'un – ou l'une – a été incompétent au sein d'un ministère considéré comme sa spécialité, quelles sont les chances qu'il se mette à briller ailleurs?

Finalement, que conclure? Eh bien, si le premier choix n'a pas été le bon, les possibilités que le suivant fonctionne demeurent encore plus faibles. Par ailleurs, on est en droit de craindre que si l'équipe ministérielle n'arrive pas à «livrer la marchandise», comme on dit, le problème véritable se trouve ailleurs.

Probablement au-dessus.


* Dans le cas qui nous occupe, sur les 27 ministres que comptait le gouvernement avant le «remaniement», 14 ont été mutés, ce qui représente 51,9 % des ministres. A contrario, cela signifie que la note du gouvernement Couillard (le nom est marrant) est de 48,1 %. Pas de quoi pavoiser, mon Philippe.

Aucun commentaire: