samedi 30 janvier 2016

vendredi 29 janvier 2016

La manie du remaniement



On assiste souvent dans les officines gouvernementales au processus pudiquement appelé «remaniement ministériel». L'exercice consiste à changer les portefeuilles de certains ministres, d'en rétrograder quelques-uns et de promouvoir des députés d'arrière-ban.

Le jeu de chaises musicales intéresse au plus haut point les journalistes qui, en temps normal, n'ont que des platitudes à nous mettre sous la dent. Effectivement, le procédé donne lieu à quantité de commentaires et d'analyses toutes plus empreintes de virtualités les unes que les autres.

Cependant, on oublie trop facilement qu'un remaniement ministériel est d'abord et avant tout un constat d'échec à demi-mot. Sans l'admettre, on signifie que l'équipe telle que constituée n'arrive pas à faire le travail qu'on attend d'elle. Il importe alors, afin de chercher à rebâtir la crédibilité d'un gouvernement en mal d'orientation, de la réorganiser afin de se donner une chance de succès accrue relativement aux dossiers à traiter. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer.

Il est d'ailleurs assez facile d'estimer dans quelle mesure un gouvernement prend conscience de sa propre incapacité lorsqu'on établit un pourcentage du nombre de ministres qui sont remplacés ou tout simplement déplacés. A contrario, ce pourcentage donne la note que s'attribue le pouvoir en place. Par exemple, si le remaniement touche 40% des ministres, cela signifie que le gouvernement mérite une note de 60%. Bah! c'est quand même la note de passage! Quantité de cancres en seraient très heureux*.

Ce qu'on oublie surtout de souligner, c'est que l'équipe d'origine, celle qui disparaît dans la tourmente, a bel et bien été choisie par le chef, lequel aurait dû être suffisamment compétent pour mettre en place les personnes les plus capables du premier coup. Je sais bien que les contraintes des tractations de coulisse et les choix discutables de l'électorat ne garantissent pas toujours que les meilleurs cerveaux sont mis à contribution. Cependant, qui dit remaniement dit également que ce sont grosso modo les mêmes qui continuent à servir, quoique à des postes différents. Si l'un – ou l'une – a été incompétent au sein d'un ministère considéré comme sa spécialité, quelles sont les chances qu'il se mette à briller ailleurs?

Finalement, que conclure? Eh bien, si le premier choix n'a pas été le bon, les possibilités que le suivant fonctionne demeurent encore plus faibles. Par ailleurs, on est en droit de craindre que si l'équipe ministérielle n'arrive pas à «livrer la marchandise», comme on dit, le problème véritable se trouve ailleurs.

Probablement au-dessus.


* Dans le cas qui nous occupe, sur les 27 ministres que comptait le gouvernement avant le «remaniement», 14 ont été mutés, ce qui représente 51,9 % des ministres. A contrario, cela signifie que la note du gouvernement Couillard (le nom est marrant) est de 48,1 %. Pas de quoi pavoiser, mon Philippe.

jeudi 28 janvier 2016

Bonne Vénus et malvenus

En ce moment, le président de l'Iran, Hassan Rohani, est en train de «guidouner» en Europe. On sait que, dernièrement, un accord relativement au nucléaire avait été conclu, ce qui a permis d'alléger – voire d'abolir – les restrictions commerciales envers ce pays. Même le CAnada entend normaliser ses relations avec l'Iran; c'est tout dire.

Présentement, M. Rohani est en Italie où il compte signer une quinzaine d'accords représentant des milliards de dollars. Afin de prévenir la crampe de l'écrivain, il entrecoupe les séances de signature avec des visites de certains sites romains, dont le Capitole.

Le bureau de l'État responsable du protocole a pris l'initiative d'y masquer les statues représentant la déesse Vénus avec des paravents. Déjà que Vénus était une représentation du corps humain, celui de femmes nues de surcroît, et de divinités païennes par-dessus le marché. Bref, couvrez cet art qu'il ne saurait voir...

La peur a dû saisir les responsables italiens que la chose pût coûter un ou deux millions par mamelle. Dans le même ordre d'idées, les repas protocolaires sont servis sans vin ni aucune autre boisson alcoolisée, de peur que ça coûte quelques millions par gamelle, sans doute. Décidément, les pauvres musulmans ne savent pas ce qu'ils manquent.

Quoique l'hypocrisie religieuse fait bien souvent en sorte qu'ils ne le manquent peut-être pas autant qu'on pense.


La Jocrisse

mardi 26 janvier 2016

Le passif de l'actif

Depuis qu'il s'est lancé en politique, Pierre-Karl Péladeau, dit «PKP», n'a jamais été aussi actif. Or, de tous les chefs que le Parti québécois (PQ) a eus, c'est sans doute ce cher bon, gros, vieux PKP qui traîne le plus lourd passif.

Passif auprès des syndicats, d'abord, la clientèle privilégiée du PQ. Le passé anti-syndical de PKP, avec ses lock-outs à répétition ne lui a pas fait gagner des points auprès de la base. Pas plus que des syndiqués amers et méfiants ne seront jamais portés à voter pour lui.

Passif auprès du vote progressiste, ensuite. Il ne faut pas oublier que Quebecor (oui, oui, sans accent) était propriétaire du groupe de presse Sun News Network, au CAnada, qui a activement moussé les candidatures conservatrices lors des campagnes électorales ayant porté – puis maintenu – Stephen J. Harper au pouvoir. Sans compter ses appuis à tout ce que l'ouest du CAnada eût pu comporter comme mouvements de droite (lire: le tristement célèbre parti «Wildrose» albertain, entre autres). Cela sans compter les multiples prises de position ayant semé la controverse. Finalement, les ennuis financiers vinrent à bout du groupe dont le permis d'exploitation lui fut retiré en mars 2015.

Passif financier, également, pour faire suite à ce qui précède. En effet, quoique fils à papa, PKP n'a peut-être pas hérité de toute la détermination du paternel en affaires. Soulignons tout de même que ce dernier a connu ses revers et que, comme elles l'ont fait plus tard pour le fils, les institutions québécoises se sont précipitées à son secours en plus d'une occasion. Dans une large mesure, l'empire Quebecor s'est constitué, et surtout maintenu, avec des fonds publics.

À tout cela s'ajoute un passif de crédibilité. À savoir que sa réputation en tant qu'«évadeur fiscal» le place dans une position de faiblesse face à ses adversaires politiques, surtout lorsque viendra le moment de mettre sur la sellette l'incurie gouvernementale sur le plan de l'administration des finances. Et puis, l'autre passif de crédibilité tient à ce que certains d'entre nous se demandent toujours où diable était ce grand patriote québécois lors des deux référendums? Et de toutes ces élections provinciales et fédérales au cours desquelles il est resté coi comme une huître?

Face à tout cela, les militants placés devant leur bulletin de vote lors de la course à la chefferie ont dû se livrer à un calcul pragmatique, une excellente initiative en politique. PKP étant millionnaire, et à la tête d'un important groupe de presse de surcroît, lesdits militants ont sûrement cru que ces ressources allaient être mises à la disposition du mouvement souverainiste. Or il ne fut rien de tout cela. La feuille de chou quotidienne – celle de Montréal autant que celle de Québec – ne fait pas davantage de place au discours indépendantiste qu'aux prises de position résolument fédéralistes. Seul «avantage», quelque lèche-bottes de service – populiste et fascisant – a changé son fusil d'épaule dans sa colonne et a cessé de tirer à boulets rouges sur le PQ. C'est bien peu.

En définitive, pourquoi PKP est-il chef du PQ? Personnellement, je n'en ai aucune idée. J'espère que PKP lui-même soit au courant.

Lui et le président de son conseil d'administration; un certain Brian Mulroney, m'a-t-on dit…



lundi 25 janvier 2016

Pire équation

Le temps a beau passer, nous sommes toujours englués dans le glissant dossier Énergie-Est. Vous savez, le fameux pipeline qui doit acheminer le pétrole sale – quel pléonasme donnant une riche idée de ce que c'est… – de l'Ouest cAnadien jusqu'aux raffineries et terminaux de la côte est. En particulier ceux appartenant aux seigneurs des Maritimes, la famille Irving.

La semaine passée, des maires de la région de Montréal, incluant l'inébranlable Denis «de poule» Coderre, ont exprimé leur refus de voir le fameux pipeline passer sur les territoires de leurs municipalités.

Coup de tonnerre dans l'azur fuligineux des Prairies!

De l'Alberta à la Saks…, la Sawek…, la Sektwan… – en tout cas, l'autre province de l'Ouest, là –, ce fut le tollé. Qu'il s'agisse de maires de ministres ou même de premiers ministres, le concert de commentaires outrés n'a pas eu de cesse pour blâmer le sempiternel égoïsme du Québec (comprendre: des maudits french pea soup). Comment cette province, gâtée-pourrie à coups de péréquation – on nous a rebattu les oreilles avec ce cliché –, pouvait-elle oser refuser un tout petit pipeline de rien du tout et condamner ainsi la croissance pétrolière éhontée de l'Ouest?

D'abord, et ceci dit sans vouloir la ramener, il faut bien admettre que la prospérité de l'Ouest amenée par le pétrole a artificiellement gonflé la valeur du dollar cAnadien et, de ce fait, a considérablement nui aux exportations de l'industrie manufacturière du Québec. Mais ça, évidemment, tout le monde s'en foutait à l'époque où le prix du baril de pétrole s'envolait.

Ensuite, il faudrait expliquer ce qui fait que nous devrions être si solidaires de ces gens. N'oublions pas que le pétrole consommé au Québec est importé de l'étranger, principalement de la mer du Nord. Personne, jamais, au CAnada, n'a songé nous offrir des tarifs préférentiels afin que nous puissions acheter du pétrole à meilleur prix. Comme d'habitude, il a fallu se démerder nous-mêmes, sans l'aide de ces chers compatriotes qui nous aiment tant les veilles de référendum.

Et puis, que je sache, la Colombie-Britannique a refusé, elle aussi, le passage d'un pipeline sur son territoire et personne n'a accusé cette province de tous les défauts. Ou est-ce que la bisbille pan-cAnadienne n'est pas parvenue à nos oreilles? C'est possible, mais j'en doute.

Enfin, lorsque leur pipeline finira par laisser fuir la saloperie, qui sont ceux qui ramasseront la facture? Les provinces de l'Ouest? Ça m'étonnerait! Le Québec se fera encore accuser d'égoïsme si, alors, il devait demander que les rednecks des Prairies paient l'écot de leur incurie.

Que répondre à ce déballage hypocrite fleurant le racisme à la sauce anglo-saxonne, auquel nous assistons présentement?

Commençons par cesser de payer notre part du fédéralisme cAnadien. Nous verrons ensuite si nous avons encore besoin de leur saleté de péréquation...


Superbe paysage du nord de l'Alberta